Conseils de Pros a été créé par GIJN pour relayer des conseils méthodologiques spécifiquement pour les journalistes francophones. Si vous avez une idée d’article sur des techniques d’enquête ou ressources spécifiques, écrivez-moi à marthe.rubio@gijn.org.
Dans le cadre des élections fédérales canadiennes de 2019, les data journalistes canadiens Naël Shiab et Valérie Ouellet ont publié une enquête révélant, chiffres à l’appui, que les partis politiques canadiens placent bien plus souvent les femmes dans des circonscriptions plus difficiles à obtenir et leur fournissent moins d’argent en moyenne qu’aux hommes pour financer leur campagne. Mécaniquement, les femmes ont donc moins de chance d’être élues que les hommes, renforçant les stéréotypes selon lesquels les électeurs votent moins pour les femmes que pour les hommes.
Cette enquête est facilement reproductible dans d’autres pays et dans d’autres secteurs, à condition d’avoir accès à des données spécifiant le genre des personnes. Naël Shiab a expliqué à GIJN la méthodologie qu’ils ont utilisé pour réaliser ce travail.
1. Ils ont téléchargé les données électorales sur le site du Parlement du Canada.
2. Ils ont déterminé quelles circonscriptions étaient les “châteaux forts” des partis politiques, c’est à dire les circonscriptions remportées par un candidat du parti lors des deux élections précédentes avec une marge d’au moins 10 %. Des critères qui fonctionnaient bien pour le contexte canadien mais qui peuvent être adaptés en fonction des pays ou régions.
3. Avant de commencer à travailler les données, ils ont validé leur méthodologie (les calculs et l’analyse qu’ils envisageaient de faire) avec des chercheurs, Melanee Thomas et Marc-André Bodet, deux professeurs de sciences politiques qui s’intéressent à cette même question.
4. Une fois cette méthodologie validée, ils ont pu calculer grâce à la colonne “Genre” si les femmes étaient placées plus ou moins souvent dans des ”châteaux forts”.
5. Ils ont élaboré un script pour obtenir les données sur le soutien financier des partis pour les candidats qui les intéressaient.
6. Ils ont croisé ces données avec les données électorales précédemment travaillées et calculé combien en moyenne recevaient les femmes et les hommes pour financer leur campagne.
Marthe Rubió est la rédactrice francophone de GIJN. Elle a travaillé en tant que data journaliste au sein du journal argentin La Nación et comme journaliste indépendante pour Slate, El Mundo, Libération, Le Figaro ou Mediapart.